mardi 30 juin 2015

Six Mardis avec H. F. Ito

Chers Amis,

Heureux Été !

J'espère que vous allez bien, et me réjouis de vous retrouver sur le Taimyo network cet été.

Cette fois je voudrais que nous concentrions notre attention sur Ritsu-i-ju Meiso-ho (10 positions de méditation debout). J'aimerais en particuler vous faire part de ma dernière compréhension et appréciation des quatre postures de la seconde moitié de la méditation: de Kenka-I (#5) à Kenshin-I (#6), de Kenshin-I (#6) à Bokyo-I (#7), et de Bokyo-I (#7) à Joshin-I (#8).

Vous trouverez ci-dessous quelques pensées que j'ai préparées pour cette série de six Mardis tenus au dojo de Day street à San Francisco entre le 28 Juillet et le 1er Septembre. J'espère que ces pensées vous apporteront une perspective nouvelle et gratifiante pour votre méditation.

Sincèrement,
H. F. Ito





dimanche 21 juin 2015

Le Sutra du Cœur et la Méditation

Joyeux Solstice !

C’est avec grand plaisir que je vous transmets le texte suivant comme support de mon atelier de méditation Taimyo cet été.

Lorsque j’ai lu cet essai de Matsuyama sur sa compréhension du Sutra du Cœur et sa relation avec la méditation, j’ai demandé à le traduire en Anglais pour les pratiquants de Shintaido et de Life Exercise dans le monde.

L’essai de Matsuyama traite de Chuang Zhou (Zhuang Zi), un disciple de Laozi qui écrivit sur les enseignements de Confucius. Il décrit aussi comment certains aspects du livre de Chuang Zhou sont liés au Sutra du Cœur et à la méditation.

Merci, Shin-Ichi !

Haruyoshi Fugaku Ito, le 21 Juin 2015

PS: si on l’aborde avec une perspective occidentale traditionnelle, ce texte peut paraître très déroutant. Les raisons en sont que 1) l’éducation occidentale met traditionnellement l’accent sur des explications linéaires, avec une connection claire entre chaque point, et 2) la culture occidentale exige souvent une compréhension intégrale quasiment immédiate. Mais concernant ce type de pensée, je ne m’attends pas à ce que quiconque « saisisse » immédiatement; vous devez la ruminer, la laisser à l’arrière-plan de vos pensées pendant un moment, avant que l’idée modifie suffisamment votre approche pour que vous puissiez consciemment la comprendre.

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Le Sutra du Cœur et la Méditation — par Shin-Ichi Matsuyama

Le Sutra du Cœur (Hanya Shingyo en Japonais) peut être vu comme un Guide pour la méditation. En tant que manuel d’instructions il a beaucoup en commun avec les livres de méditations anciens et nouveaux, qu’ils soient orientaux ou occidentaux.

Note d’Ito: Le Sutra du Cœur est fréquemment utilisé lors des funérailles. Il peut faire office de pont entre ce monde et au-delà. Il est très court, aussi nombre des personnes plus âgées au Japon et dans le reste de l’Est et du Sud-Est de l’Asie l’ont mémorisé, et le récitent matin et soir pendant la période de deuil comme une sorte de prière afin que l’esprit de la personne puisse effectuer la transition d’ici à là sans problème.

Ici, Matsuyama fournit trois exemples de fils conducteurs pour la méditation — qui paraissent à première vue très différents. Il nous dit qu’ils sont en fait très semblables. Mais chacun adopte une approche complètement différente.

Clair comme l’air du matin
朝徹
(Prononciation en Japonais: Chou Tetsu)
(Prononciation en Chinois: Zhao Che)

Il existe un état méditatif appelé Chou Tetsu (Zhao Che) — un état de conscience aussi clair que l’air au matin — auquel beaucoup de gens s’efforcent d’accéder. Or selon Chuang Zhou, cet état n’est pas le but, mais plutôt le point à partir duquel la conscience grandit. Le processus qu’il décrit pour progresser au-delà de ce point de départ a beaucoup en commun avec les approches de méditation adoptées au cours du temps par plusieurs traditions de sagesse.

Ce que l’on vous demande d’observer dans un état de méditation profond est assez commun à beaucoup de religions. Lorsque nous entrons en méditation profonde, nous nous immergeons dans l’ici et maintenant, et nous absorbons dans les choses telles qu’elles sont. D’ordinaire, nous ne pouvons voir ce qui se passe autour de nous sans y ajouter notre propre interprétation mentale.

Mais dans cet état, nous n’ajoutons ni n’affectons rien. Nous sommes simplement présent et faisons l’expérience du monde sans aucun filtre. Les détails de ce que nous voyons et ressentons n’ont pas grande importance. Ce qui est vraiment important est que nous maintenions notre conscience en éveil quoi qu’il s’y manifeste. Cela est essentiel afin de permettre à notre véritable conscience de se développer.

Il y a beaucoup de facons d’exprimer ces concepts. L’une est d’utiliser un langage très simple, presque comme un koan:
Le corps que j’ai n’est pas mon véritable moi
Les sens que j’ai ne sont pas mon véritable moi
Les pensées que j’ai ne sont pas mon véritable moi
L’esprit que j’ai n’est pas mon véritable moi
Je réalise qu’il n’y a pas de moi
Je suis Existence-Conscience

Vacuité
心斎
(Prononciation en Japonais: Shin Sai)
(Prononciation en Chinois: Xin Zhai)

回曰:「敢問心齋。」
仲尼曰:「若一志,无聽之以耳而聽之以心,无聽之以心而聽之以氣!聽止於耳,心止於
符。氣也者,虛而待物者也。唯道集虛。虛者,心齋也。」
顏回曰:「回之未始得使,實自回也;得使之也,未始有回也;」
『荘子/人間世』http://ja.wikisource.org/wiki/荘子/人間世

Gankai (Yan Hui), un disciple de Confucius, lui dit :
« J’aimerais connaître votre interprêtation de Shinsai (Xin Zhai). »

Confucius répondit:
« Observe tes propres aspirations. N’écoute pas avec tes oreilles, mais avec ton cœur. Et après cela, n’écoute pas avec ton cœur, mais avec ton Ki (Qi). Avec tes oreilles, tu ne peux entendre que les sons, et avec ton cœur tu ne peux comprendre (et ne percevoir) que ce qui te parvient de l’extérieur. Mais le Ki (Qi) est naturellement vide, aussi peut-il recevoir tout et n’importe quoi. Le Dao se rassemble dans la vacuité, et cette vacuité est Shin Sai. »

Le disciple dit alors : « Avant de connaître Shinsai, j’étais Gankai, mais maintenant que je connais Shinsai, il n’y a plus de Gankai. »

Note d’Ito: “Vacuité” peut sembler différent de “Clair comme l’air du matin”. Cependant, Matsuyama suggère qu’en y pensant, nous verrons que les deux sont en réalité deux aspects d’une même chose.
Nous pourrions paraphraser cela comme « Je connaissais beaucoup de choses sur moi-même à un certain point. Mais lorsque j’ai vu comment les choses sont réellement, j’ai réalisé que “moi-même” n’a pas même d’existence. »


Ni Vie, Ni Mort
攖寧
(Prononciation en Japonais: Einei)
(Prononciation en Chinois: Ying Ning)

「參日而後能外天下;已外天下矣,吾又守之,七日而後能外物;已外物矣,吾又守之,九日,而後能外生;已外生矣,而後能朝徹;朝徹,而後能見獨;見獨,而後能无古今;无古今,而後能入於不死不生。殺生者不死,生生者不生。其為物,無不將也,無不迎也;無不毀也,無不成也。其名為攖寧。攖寧也者,攖而後成者也。」

『荘子/大宗師』http://ja.wikisource.org/wiki/荘子/大宗師

Confucius raconte :
Après 3 jours de méditation avec Shin Sai (Xin Zhai) je me suis retrouvé séparé du monde. Je me suis senti humble, et ai continué pendant encore sept jours, et me suis séparé du monde matériel. J’ai continué à méditer et après neuf jours je me suis séparé de la vie et de la mort.
Après cela, j’ai senti que j’étais finalement arrivé à Chou Tetsu (Zhao Che) — comme un matin s’éveillant.

Après Chou Tetsu, j’ai pu faire l’expérience de Doku (Du) une perspective selon laquelle j’étais indépendant et non influencé par les choses autour de moi.

Après avoir fait l’expérience de Doku (Du) le passé et le présent avaient disparu. Après que le passé et le présent avaient disparu, j’ai pu entrer dans le domaine de ni vie, ni mort.

Il en allait ainsi :
Pas de mort pour ceux qui voient la vie sans commencement
Pas de naissance pour ceux qui voient la vie sans fin
Lorsqu’ils entrent en contact avec le monde matériel
Rien n’est pas laisser aller, de ce fait tout est laisser aller
Rien n’est pas bienvenu, de ce fait tout est bienvenu
Rien n’est pas voué à disparaître, de ce fait tout est voué à disparaître
Rien n’est pas mis au monde, de ce fait tout est mis au monde

Cet état peut être appelé Einei (Ying Ning). La personne qui a atteint l’état de Einei (Ying Ning) est vide, et n’apparait que lorsqu’il ou elle entre en contact avec le monde matériel.

Matsuyama pense : Einei signifie que toutes les choses sont laisser aller, toutes les choses sont bienvenues, toutes les choses sont vouées à disparaître et toutes les choses sont mises au monde. En d’autres termes, toutes les choses sont vraies lorsque elles sont vues dans leur vrai état.

Einei n’est pas facile à comprendre, et est souvent mal interprété. L’érudit japonais Kanaya Osamu en déduit qu’il s’agit de « rester calme dans la tempête déchaînée des choses matérielles », l’érudit chinois 郭嵩燾 dit que 攖 signifie garder un cœur imperturbable même lorsqu’on est harcelé de l’intérieur comme de l’extérieur, et l’érudit chinois 馬叙倫 dit que l’ancien caractère 攖 signifie être en paix même lorsqu’on est encerclé par 寧.

Les lettrés vivent dans un monde d’idées difficiles, aussi trouvent-ils pareillement cette idée difficile. Mais les Shintaidoistes ont appris à vivre en wakame, et cela rend aisé de garder un cœur tranquille lorsque beaucoup de choses bougent autour de nous.


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À propos de l’auteur

De 1997 à 2001, Shin-Ichi Matsuyama était chercheur en biologie au Baylor College of Medicine à Houston, Texas. Après avoir étudié les mécanismes moléculaires du comportement social, il déménagea en 2001 à Osaka, Japon, où il continua ses recherches sur l’évolution de systèmes symbiotiques. En 2004 il délaissa la recherche scientifique pour se consacrer à l’étude de l'acupuncture Japonaise traditionnelle, la médecine naturelle et le Shintaïdo.

Remerciements
Les personnes suivantes ont contribué à ce texte:
  • Texte original par Shin-ichi Matsuyama
  • Traduction anglaise par Lee Seaman
  • Vérification du texte chinois par Clélie Dudon & Yi Shiu Liu
  • Traduction française par Patrick Bouchaud
  • Version anglaise finale par Tomi Nagai-Rothe

Références

samedi 28 février 2015

Devant la Mort

J’ai été contacté récemment par une pratiquante de Shintaido qui vient de se voir diagnostiquer une maladie grave, peut-être mortelle. Cela m’a rappelé que nous devons tous faire face à cette situation tôt ou tard dans nos vies, et qu’en général nous ne nous y sentons pas prêts.

Cela m’a fait penser à mes propres épreuves de santé, et j’aimerais ici faire part du processus que j’ai traversé quand j’ai fait face à la mort en 2004 et 2006, et comment j’ai pu revenir à moi :

Le Processus

J’étais choqué et effrayé aux premiers stades de mes trois urgences médicales. Je pensais à mettre fin à mes jours si je devais rester physiquement handicapé. Heureusement, je me suis laissé la possibilité de revenir à une condition physique normale, bien que j’aie été prévenu par les docteurs que cela pouvait ne pas être possible.

Ces trois urgences médicales graves m’ont remis à l’esprit ce que je voulais vraiment faire pendant le reste de ma vie, et en fin de compte m’ont aidé à prendre la mesure de ce que je pouvais vraiment accomplir. Depuis lors j’ai utilisé ces leçons comme mes principes de vie dès que je dois faire un choix dans ma vie.

Développer Buts et Principes
  1. Je vous recommande de faire une liste de ce que vous voulez vraiment être/faire du reste de votre vie, incluant tous vos souhaits.
  2. Commencez à penser à toutes les manières dont vous pourriez les faire advenir.
  3. D’entre vos espoirs et rêves, sélectionnez-en un ou deux que vous pouvez véritablement mettre en pratique.
  4. Commencez à établir un plan clair pour les faire aboutir.
  5. Alors vous découvrirez ce que la Nature/l’Univers attend de vous.
Selon moi c’était là la Voie du Samouraï lorsqu’un samouraï devait faire face à sa mort pendant sa vie.

Faire face à la mort est une expérience très effrayante, mais c’est aussi une grande opportunité de clarifier votre esprit et de clarifier votre destinée. Je crois que la vie que vous avez vécue jusqu’à ce point a beaucoup de sagesse. Utilisez-la pour vous guider là où vous devez aller et pour informer ce que vous devez faire maintenant.

La valeur de votre vie n’est pas basée sur sa longueur. La valeur vient de la richesse de votre expérience de vie.

Namu amida butsu, Immanuel Amen !
Om, shalom
A, E, I, O, Um
Sincèrement vôtre,
- Ito

Février 2015

jeudi 1 janvier 2015

Tenshin-Ken, La Pratique et Notre Vrai Moi

Bonne Année !

Alors que nous entamons la nouvelle année, je me réjouis de partager les pensées qui me tiennent à coeur concernant Tenshin-Ken (天真剣).

Cela a beaucoup à voir avec ma philosophie de vie et ma recherche des changements que je crois que nous espérons tous observer dans notre monde. Mais comme à mon habitude, permettez que j’aborde le sujet par la technique !

Tenshin-Ken, La Pratique et Notre Vrai Moi

Comme vous le savez, au Shintaido nous bénéficions d’un large ensemble de formes de kumites regroupées sous l’appellation Kumite Kirioroshi.

Au sein de ce groupe de mouvements, Tenshin-Ken = Daijodan Kirioroshi. Nous coupons à tour de rôle notre partenaire de part en part. Ce mouvement physique élimine les tensions, ouvre les endroits bloqués, et libère notre moi intérieur (“Jiga”). Dans ce processus, ensemble car partenaires, nous atteignons “Muga”, l’unification au-delà du conflit : 1 + 1 = 1

Un poète Japonais célèbre écrivit ce haiku :
shizukasaya iwa ni shimi-iru semi no koe 
“Le silence remplit tout, même la roche. Puis la voix d’une cigale …”
A la lecture de ce haiku, la plupart des Japonais pensent à une belle journée d'été à la campagne.

Mais lorsque Philippe Beauvois, l’un de mes étudiants en France, découvrit ce poème, il en retira une compréhension complètement différente :
Le silence = silence complet, un monde dans lequel les pensées bruyantes et les choses superflues ont été complètement éliminées.
La roche = l’ego qui est replié en soi.
Semi no koe = un message de la nature, Tenshin, finit par pénétrer notre vrai moi
Et donc, en résumé,
“Le silence apaise les bruyantes pensées. Toute chose superflue disparaît, et mon ego est finalement détendu. Entends-tu ? L’univers parle.”

Echapper à Nos Privilèges

Dans la Rakutenkai il y avait deux frères Okada. Tout le monde connaît Mitsuru Okada, qui était membre fondateur de la Rakutenkai et est maintenant Maître Instructeur. Mais beaucoup de gens n’ont jamais entendu parler de son frère cadet, Gan Okada, qui faisait lui aussi partie de l'équipe de base. Avant que je quitte le Japon pour devenir un émissaire du Shintaido dans le monde, je dirigeais le centre du Shintaido à Tokyo dans les années 1970. Nous avions un petit bureau à Shinjuku, et Gan Okada m’aidait {beaucoup} dans la partie relations humaines associée à la conduite de cet office. Comme son frère Mitsuru, Gan conduisait un taxi pour gagner sa vie, et lorsqu’il finissait son travail il venait au bureau, alors que la plupart des gens auraient choisi de manger, de se relaxer ou dormir. Il n’avait pas de savoir-faire particulier tel que comptabilité ou gestion, mais il était formidable avec les gens.

Gan avait vraiment grand coeur, et il se sentait concerné par des choses auxquelles la plupart des gens ne pensaient pas. Il se sentait concerné par les femmes qui étaient exploitées dans le monde souterrain de la prostitution, et il montrait des films documentaires dans l’espace de réunion du Shintaido sur les conditions de vie difficiles des mères célibataires avec leurs enfants. Cela lui tenait tellement à coeur que la police secrète commença à le tenir à l’oeil.

Nous étions tous jeunes, et pour la plupart étions juste fous des arts martiaux. Nous adorions bouger notre corps, et nous aimions les sensations que nous retirions du keiko, cependant nous n’avions pas réellement intégré notre pratique des arts martiaux dans nos coeurs. Mais Gan savait déjà, au plus profond de lui, pourquoi il pratiquait le Shintaido.

Gan aimait cette chanson du chanteur et compositeur Japonais Nobuyasu Okabayashi :
Voici ce dont nous rêvons !
Nous rêvons d’une fin à la peine
Nous rêvons d’une joie inconnue,
Ne nous laissons pas piéger par la peine
Tournons-nous vers la joie inconnue, et volons dans sa direction ! 

Okabayashi travaillait avec des personnes défavorisées, presque au point où certains l’auraient qualifié d'éducateur social. Mais au bout d’un moment il devint connu, et les gens aisés se mirent à assister à ses concerts. Okabayashi alors retourna sa chanson et invita les gens de son public à ne pas se laisser piéger par leur fortune et par leurs privilèges, mais à sortir et aller dans le monde des gens défavorisés.

Gan Okada éprouvait le même sentiment. Dans la Rakutenkai, il nous encourageait toujours à sortir de notre position privilégiée et à partager nos vies avec des gens en difficulté. Bien sûr nul d’entre nous n’avait d’argent, mais nous étions en bonne santé et enthousiasmés par notre pratique. Et la plupart voulaient rester auprès d’Aoki-sensei et pratiquer avec lui, plutôt que de sortir aider le monde. Aussi Gan était-il souvent frustré.

Après mon départ pour les États-Unis, Gan est retourné à son petit village dans la Prefecture d’Aichi. La plus grande ville est Nagoya, mais Gan vivait dans une communauté très rurale. Il subvenait à ses besoins grâce à son taxi, et démarra un centre de soins de jour pour aider les jeunes physiquement et mentalement handicapés.

C'était il y a 35 ans. Il a aidé les gens autour de lui depuis tout ce temps, et est maintenant directeur de l’un des hospices médicalisés les mieux cotés de la Préfecture d’Aichi. Il a vraiment donné corps à son rêve de venir en aide aux gens défavorisés et oubliés ; il l’a fait de son vivant.

Ma Compréhension Actuelle de Tenshin-Ken

Pour parler simplement, l’esprit de Tenshin-Ken peut être exprimé par la phrase italienne “Bella Ciao !” 

Bella Ciao est l’expression d’une passion profonde pour la vie.

Le vidéoclip {Hasta Siempre} de Nathalie Cardone capture ma passion pour restaurer leur pouvoir aux gens autour de nous. Dans cette vidéo une jeune mère avec un enfant en bas âge dans les bras et un fusil sur le dos marche à travers les rues d’un petit village d’Amérique du Sud puis à travers les champs. Elle passe des gens pauvres et désespérés, certains travaillant comme esclaves dans les champs, et ils déposent leurs outils et se joignent à elle.

Ces temps-ci je suis très passionné par l’esprit d’origine du Bushido - le coeur des arts martiaux - qui est au centre de l’oeuvre de ma vie. Alors que le Budo est la technique des arts martiaux telle que nombre d’entre vous l’avez étudiée, le Bushido est beaucoup plus profond.

Pour développer le Shintaido, Aoki-sensei a dépouillé tout l’attrait et l’emballage des arts martiaux, ainsi que leur connexion au Bushido. Il a décidé d’enlever la connexion au Bushido du fait de l’environnement Japonais de l’epoque - les militaires Japonais voulaient utiliser le Budo pour renforcer sa culture.

Aussi Aoki-sensei pratiquait et enseignait une forme et mouvement pure (détachée de son contexte).

La philosophie du Shintaido gravite autour de l’ouverture, la mise à nu et la re-découverte à partir de zéro. C’est pourquoi après avoir pratiqué la forme qu’Aoki-sensei nous a offerte, nous nous trouvons face à la question :
Comment nous défaire de la surface de notre propre pratique (cad. la déconstruire) de manière à trouver notre propre forme et véritable essence ?

Pour moi, le Bushido signifie se tenir à la frontière entre la vie et la mort pour le compte d’autrui. Il nous faut le courage de faire entendre la voix de ceux moins fortunés que nous - et inspirer les gens à se faire entendre eux-mêmes. Cela requiert deux pas - 1) Trouver sa véritable essence personnelle et en tirer force et inspiration et 2) Prendre des mesures pour le permettre à d’autres.

Au Shintaido, Tenshin-Ken devint kirioroshi kumite et nous avons gagné une grande clairvoyance en le pratiquant. Nous avons travaillé dur pour abandonner notre ego et aller au-delà de nous-mêmes. Mais cela peut aussi devenir une sorte d’illumination centrée sur soi-même sans le second pas. Si nous sommes bloqués au premier pas, nous passons à côté du message courageux de la vidéo et de l'opportunité d'être vraiment libre et unifié. Lorsque nous nous levons et clamons “Non!” face à une situation injuste, comme la souffrance des pauvres gens de la vidéo, nous ne sommes plus définis par nos idées de risque et de perte personnels. Notre propre courage émerge, et avec lui notre vrai moi, qui est plus gros que le moi de notre égo.

Le message originel de Tenshin-ken est la capacité de quelqu’un qui est vraiment faible ou se trouve dans une situation injuste de se connecter avec Ten (la Vérité Universelle) pour s’exprimer et changer sa vie. Mon espoir est de ré-infuser ce message originel de Teshin-ken dans le Bushido.

Pour ce faire, nous devons sortir de nos vies confortables et privilégiées, et aller chercher ceux qui sont moins privilégiés que nous le sommes (Deuxième Pas). La question est,
Comment créer un espace qui permette aux autres de trouver leur voix et se faire entendre par eux-mêmes ?

Gan Okada savait très clairement pourquoi il étudiait avec Aoki-sensei : pour développer son sens de la justice sociale. Il a absorbé les valeurs et les pratiques du Shintaido et les a transcrites en actions de justice sociale. Chacun d’entre nous doit trouver un moyen de transcrire ses connaissances en quelque chose qui crée un changement positif dans le monde, et cela en puisant dans ce que nous avons appris au Shintaido.

J'espère que cette fois nous parviendrons à redécouvrir le coeur originel du Bushido.

Je me réjouis de continuer à avancer avec vous en 2015, dans ce nouveau monde de courage et d’espoir.

Haruyoshi Fugaku Ito

1er Janvier 2015

P.S.

Merci beaucoup à Lee Seaman et Tomi Nagai-Rothe qui m’ont permis d’exprimer mon message en Anglais, et à Patrick Bouchaud pour le Français !